Médias

Depuis longtemps confronté aux mutations portées par le digital, le secteur des médias connaît aujourd’hui une transformation rapide qui s’explique par l’arrivée de nouveaux acteurs sur le marché et d’évolutions technologiques majeures.

Accélération des transformations

Ces transformations touchent l’ensemble de la chaîne de valeur et confrontent les acteurs à deux tendances dominantes, touchant le public et le contenu.

Les usages des publics évoluent. On passe du média que l’on « consomme » au média que l’on « vit » et que l’on « personnalise ». Les nouvelles logiques de consommation? N’importe où, n’importe quand, sur tous les appareils, pour tous les contenus. Elles ciblent tout particulièrement les jeunes natifs numériques.

L’accès aux contenus se fait via des plateformes, en réponse à ces nouveaux usages. Cette plateformisation passe par l’intermédiaire de nouveaux acteurs, les géants du Web en tête, principalement Facebook, Youtube et Netflix. Cette tendance touche tous les formats de contenu, qu’ils soient courts ou longs, d’information ou de divertissement, textuels, audio ou vidéo. Elle se fonde sur une logique de recommandation. Les propositions de contenus sont poussées par la communauté ou en lien avec l’usage des publics.

Ces tendances bousculent les acteurs historiques des médias, qui doivent s’adapter à ces évolutions. À commencer par les déplacements d’audience. Certains publics, notamment les jeunes, désertent les canaux traditionnels linéaires pour consommer du contenu sur les plateformes numériques. La consommation vidéo à la demande représente 55 % de la consommation vidéo des 15-24 ans, contre 29 % en 2015. La durée d’écoute télévisuelle entre 2015 et 2018 a diminué de huit minutes. Le taux de pénétration de la vidéo à la demande par abonnement s’élève à plus de 65 %.

Ils font face également à la fragmentation des modèles d’affaires et particulièrement celui du marché publicitaire. Les revenus publicitaires traditionnels baissent. Les formats se multiplient. Une partie des revenus est accaparée par les géants du Web, notamment la publicité numérique, soutenue par l’utilisation des données et le développement de la programmatique.

Le lien de confiance évolue. La consommation communautaire du contenu, et notamment de l’information, amplifie le phénomène des fausses nouvelles et entraîne une défiance des audiences à l’égard des médias.

Redéfinition des enjeux

Face à cette série d’évolutions, les médias voient la valeur se concentrer désormais aux deux extrémités de la chaîne : maîtrise des contenus et connaissance du client.

Dans ce contexte, les médias disposent de nouvelles capacités à investir ou à redéfinir leurs priorités. La maîtrise de la production ou l’acquisition du contenu constitue un élément majeur pour attirer les publics. Sa distribution est ensuite essentielle. Elle doit se fonder sur des accords solides, sur fond de nécessaire débat réglementaire, afin d’assurer le maintien de la production.

Il convient ensuite de fournir la création d’une expérience toujours plus personnalisée des contenus sur l’ensemble des supports. L’enjeu est ici d’engager les publics et de créer des carrefours d’audience, porteurs d’une puissance éditoriale et économique, en s’appuyant sur les usages et les conversations.

Les médias doivent, par ailleurs, diversifier les modèles d’affaires en développant des stratégies fondées sur le client permettant de mieux valoriser les contenus premium et développer une culture de l’innovation dans un secteur en rapide évolution.

Développement de nouveaux fondamentaux

Les acteurs des médias doivent désormais maîtriser de nouveaux fondamentaux. Ils doivent, en premier lieu, repenser l’éditorial avec du contenu numérique natif. Le rôle de la rédaction évolue de plus en plus vers la vérification des faits en complément de la recherche. Elle s’appuie ainsi sur les évolutions technologiques et les nouveaux moyens de production de l’information : journalisme mobile, numérisation, intelligence artificielle en aide à la production.

Deuxième point décisif : penser au numérique avant tout. Les médias doivent se montrer capables de proposer du contenu sur des plateformes numériques aux standards du marché et conformes aux attentes des usagers. Cela implique de reconsidérer la production ou l’acquisition du contenu en développant de nouvelles méthodes de narration pour des productions numériques natives. Par exemple, en allant vers les formats courts sous-titrés qui vont à l’essentiel. Cela implique aussi de repenser les productions et les diffusions des événements, à l’instar des couvertures simultanées des courts de tennis lors des Internationaux de France.

Troisième élément à maîtriser : la diffusion. Il s’agira de mieux associer diffusion et publication numérique en y incluant le transcodage multiformat.

Ensuite, les acteurs des médias doivent s’appuyer sur de forts actifs technologiques. Ils disposent de plateformes technologiques performantes permettant de proposer une expérience de contenus voulue, qu’elle soit en temps réel, en avant-première, ou visionnée en rafale. Cette nouvelle donne technologique doit être capable de générer des carrefours d’audience. Les compétences de conception d’expérience utilisateur, d’architecture et de développement entrent ici en jeu.

Il faudra par ailleurs exploiter les capacités offertes par l’intelligence artificielle pour accompagner le travail éditorial : sélection, aide à la recherche documentaire, vérification des faits. L’industrialisation des processus liés aux métiers et une meilleure gestion de la complexité viendront alléger les moyens de production.

La structure et la maîtrise des données constituent l’un des points clés fondamentaux pour mieux comprendre les publics dans leur segmentation et leur profil. Les plateformes de gestion des données de type DMP et CDP permettent de mieux appréhender les usages en matière de contenus et de fréquence. Il s’agira de proposer une personnalisation de l’expérience du parcours et des recommandations, comme pour la stratégie de production ou d’acquisition de contenus.

Par ailleurs, parmi les fondamentaux que devront désormais maîtriser les médias, figure le développement de modèles d’affaires mixtes, combinant abonnements, accords de distribution et publicité. La nécessité de repenser leurs organisations, également, fait jour, pour aller vers plus d’horizontalité et d’agilité, accueillir l’innovation et saisir les occasions apportées par les nouveaux supports.

Ces éléments représentent une évolution systémique pour les acteurs des médias. Ils doivent être mis en place conjointement pour en tirer les bénéfices, imposant une exigence accrue dans la dynamique de transformation.

Axes de réussite

Pour réussir leur transformation, les médias doivent aujourd’hui :

  1. Penser avant tout au numérique dans la production et l’édition de contenus
  2. Se différencier dans la production ou l’acquisition de contenus, notamment locaux, en fonction des attentes des publics, et en particulier des jeunes
  3. Proposer une expérience personnalisée et engageante de l’accès aux contenus
  4. Disposer de plateformes technologiques de distribution pour y diffuser des contenus aux standards du marché, y compris la maîtrise des données d’usages pour proposer recommandations et contenus à découvrir.
  5. Diversifier les modèles d’affaires, en les basant notamment sur les clients pour sécuriser les revenus
  6. Offrir une nouvelle expérience éditoriale de l’information, basée sur la vérification des faits, la transparence et le décryptage