Du credit-as-a-service au paiement fractionné

Le crédit à la consommation connaît de grandes transformations grâce à la technologie et la data. Tour d’horizon avec les équipes « paiement de onepoint »

La pandémie a accéléré la digitalisation des paiements ces deux dernières années et bouleversé les habitudes d’achat des consommateurs (credit-as-a-service) ,avec notamment l’utilisation croissante de nouvelles solutions de paiements fractionnés appelées aussi BNPL (Buy Now Pay Later).

En parallèle, les modèles Bank as a service ont ouvert la voie à une nouvelle manière de proposer du crédit à la consommation, permettant à des acteurs comme Younited Credit d’offrir des services de crédit en marque blanche à des établissements financiers ; on parle alors de credit-as-a-service, un levier supplémentaire au service de cas d’usage d’achat en ligne.

Le Credit as a service offre instantanéité et intégration sans couture dans les parcours client

Les consommateurs n’ont plus à se rendre dans des établissements bancaires ou de crédit pour obtenir un crédit à la consommation ; ni en magasin pour régler en plusieurs fois un article grâce à une carte de crédit renouvelable. Cette tendance a été fortement poussée par la crise sanitaire liée au Covid-19, on constate ainsi de plus en plus d’acteurs qui proposent des solutions de crédit en ligne.

Le fonctionnement est simple, au moyen d’API, le serveur de l’organisme financier communique avec celui d’une institution non-bancaire permettant aux clients de cette dernière d’accéder à des services de crédit sur son site internet ou application. Dans le cas du credit-as-a-service, les offres de crédit 100% en ligne sont proposées à des établissements financiers (banques, assurances, mutuelles) pour leurs clients.

Younited Credit utilise par exemple une solution 100% cloud, s’appuyant également sur des modules de machine learning qui vont permettre d’améliorer les performances de leurs scores (pour le risque crédit), ou d’intelligence artificielle afin d’automatiser les décisions de crédit. Cette offre appelée Younited Business Solutions permet aux clients de la société de crédit à la consommation, d’utiliser, en marque blanche, sa plateforme technologique ou sa licence bancaire afin de lancer, compléter ou moderniser une activité de crédit. HSBC utilise cette solution pour son activité de crédit à la consommation en France. De son côté, Lydia, grâce à cette offre, propose un prêt express avec les fonds disponibles en 24h sur un compte Lydia ou 7 jours sur un compte bancaire.

Les banques traditionnelles commencent elles aussi a lancé des initiatives sur le credit-as-a-service. C’est le cas de La Banque Postale qui a lancé début 2021 une plateforme sous forme d’API nommée « LBPCF Business Solution ». Cette solution en marque blanche est pour le moment proposée uniquement aux partenaires de la banque. « Plus de 5 millions de personnes identifiées par LBPCF peuvent potentiellement obtenir un pré-accord en temps réel » d’après LBP.

Le paiement fractionné ou « Buy Now, Pay Later », une sucess story…

En BtoC on constate une croissance fulgurante des solutions BNPL. La valeur du paiement fractionné a atteint les 80 milliards de dollars à l’échelle mondiale en 2020 et dépasserait 250 milliards d’ici 2025. En France, ce sont 10 à 15 % des sites e-commerce qui le proposaient en 2020 et 31% des Français auraient utilisé le paiement fractionné.

En France, des acteurs comme Oney, Alma, ou Pledg proposent cette solution très attractive à la fois pour le consommateur et le commerçant. Les acteurs internationaux les plus connus sont le suédois Klarna (arrivé en France en juin 2021), l’américain Affirm ou encore l’australien AfterPay (racheté en août 2021 par l’américain Square, spécialiste des solutions de paiement et de gestion d’activité pour entreprises).

… qui offre de multiples avantages aux commerçants…

Les bénéfices du paiement fractionné sont nombreux pour le commerçant :

  • Fin des impayés : c’est l’organisme prêteur qui assume le risque
  • Augmentation des ventes les paniers moyens fractionnés peuvent être jusqu’à 4 fois supérieurs aux paniers moyens payés comptant” (source payplug)
  • Augmentation du taux de conversion
  • ou encore fidélisation du client « 76% des utilisateurs seraient prêts à changer d’enseigne pour pouvoir payer en plusieurs fois (source Floa Bank)

Pour les consommateurs, l’intérêt de ce mode de paiement se trouve dans sa simplicité d’utilisation : tout se fait en ligne en quelques clics. De plus, son taux d’acceptation est très élevé : entre 80 et 90% sur le marché français. Le paiement fractionné est par ailleurs perçu comme un outil de gestion budgétaire pour 50% des français, permettant par exemple de faire face à une dépense imprévue (étude Opinion Way pour Floa Bank).

…mais sous le joug d’une nouvelle réglementation lié au risque de surendettement du consommateur final

Cette nouvelle tendance n’est pas sans risque. On compte au Royaume-Uni, par exemple, un tiers d’impayés d’après une étude de Fitch Ratings. Les associations de consommateurs réclament ainsi une intervention urgente du régulateur car ce nouveau mode de paiement pourrait, selon elles, favoriser le surendettement. C’est également le cas en France, l’association UFC-que-choisir qualifie d’ailleurs de « nouveaux usuriers » les acteurs de BNPL et demande la révision, cette année, de la directive européenne sur le crédit à la consommation « pour supprimer les seuils permettant à des prêts de faibles montants d’échapper aux règles de protection de l’emprunteur. »

En France, le paiement fractionné n’entre en effet pas dans le périmètre de la loi Lagarde de 2010 visant à protéger le consommateur en matière de crédit. « La solvabilité n’est pas suffisamment vérifiée » selon le député LRM Philippe Chassaing qui a remis un rapport sur la prévention du surendettement au ministre de l’économie Bruno Le Maire.

Un projet de directive au niveau européen a été présenté en juin 2021 afin d’intégrer les solutions BNPL au cadre légal couvrant les crédits à la consommation. En France, cela signifierait que les paiements fractionnés de moins de 200 euros et étalés sur moins de 90 jours, devront également répondre à la loi Lagarde. Le projet prévoit d’améliorer « les règles d’évaluation de la solvabilité des consommateurs » afin « d’éviter le surendettement ».

Mais des solutions pour anticiper ce mouvement ont déjà émergés

Cette directive pourrait, à première vue, freiner l’essor des BNPL mais les fintech n’ont pas dit leur dernier mot, en effet des solutions qui respecteraient la future réglementation existent déjà. Algoan, fintech française spécialisée sur le scoring de crédit, a mis au point un nouvel algorithme qui mesure la solvabilité du candidat au paiement fractionné en moins d’une seconde.  «Cette solution repose sur le calcul d’une probabilité de défaut (‘scoring’ de crédit), sur la catégorisation des transactions pertinentes pour le crédit (revenus, charges, impayés, saisies sur compte…) et sur l’identification des transactions liées à un même contrat, C’est grâce à cela qu’il est possible de détecter les autres paiements de ‘buy now, pay later’, d’identifier les personnes consommant au-delà de leurs moyens et ainsi d’éviter un possible surendettement.» indique Paul Peyré, co-fondateur d’Algoan et responsable risques et data. Cette solution a d’ailleurs déjà été déployée fin 2021 chez Alma et Pledg.

Les fintechs sont donc armées pour faire perdurer leurs offres et mettent les moyens pour s’imposer sur ce segment qui est le nouveau du crédit à la consommation. Stripe et Klarna par exemple ont conclu un partenariat fin 2021 afin que les commerçants clients des solutions de Stripe puissent utiliser le service de paiement fractionné de la licorne suédoise Klarna.

Nous avons la conviction que la data devient donc le véritable levier stratégique de transformation des paiements et pour le comprendre il faut bien appréhender la typologie de données manipulées :

  • Données de paiement proprement dites : identifiants du moyen de paiement utilisé, montant de la transaction, date et heure du paiement, identité du commerçant, identité du bénéficiaire, IBAN, score de lutte anti-fraude du client. Dépendent du moyen et système de paiement utilisés et sont traditionnellement historicisées par les acteurs bancaires
  • Données d’achat ou de caisse : caractéristiques des produits achetés, date et lieu de l’achat, identifiants de la carte de fidélité… Elles sont observées lors de l’acte d’achat et traditionnellement collectées et historicisées par les commerçants (traditionnels ou en ligne)
  • Données contextuelles ou comportementales : connaissance client, géolocalisation, produits prospectés en amont de l’achat, temps passé à prospecter… Plus faciles à collecter lors d’un achat en ligne, elles sont aisément accessibles aux géants du numérique
  • Données liées au non-paiement : identification des ruptures de processus ou causes d’abandon et de complexité de parcours avec un focus sur les abandons de panier : Parmi les achats réalisés en ligne aux États-Unis, 50% ont lieu sur Amazon. L’abandon de panier représente 18 milliards de dollars de pertes de vente chaque année.
    • Le taux d’abandon de panier sur mobile est plus élevé (97%) que celui sur ordinateur (entre 70 et 75%).
    • Les principales raisons de l’abandon du panier sont les suivantes : le prix, le temps de chargement du site, les coûts d’expédition, la rapidité de livraison et les réductions disponibles.

Les enjeux du monde des paiements et de ces nouveaux services tournent de plus en plus autour des services apportés et donc de l’utilisation des données.

  • La servicisation , l’ouverture et l’agrégation des données: il faut impérativement que les services fournis apportent une information utile ou exploitable par les clients. C’est l’exemple AMEX et Boursorama qui vous envoient automatiquement une notification de vos dépenses (à des fins de sécurité mais aussi de lisibilité en temps réel de votre solde bancaire ou de dépenses. A l’opposé une grande banque de la place propose une analyse « environnementale » de vos dépenses qui n’agrégant pas par construction celles-ci si vous avez plusieurs cartes ou comptes de fournit pas le service attendu
  • La monétisation des données: cet enjeu est au cœur des discussions depuis la mise en place de la réglementation sur la protection des données (RGPD) car si vous souhaitez protéger vos données de navigation ou de dépenses, vous pouvez tout autant souhaitez « monétiser vos données à des fins de meilleur ciblage publicitaire et commercial : « Si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit» la formule popularisée par Bruce Willis est en train de tourner à la prise de conscience planétaire.
  • La souveraineté des données: nous nous orientons en Europe vers une relocalisation des données pour :
    • Gagner en autonomie et soutenir la création du futur réseau européen de carte bancaire EPI,
    • Renforcer la facturation électronique et favoriser l’acceptation des paiements numériques
    • Elaborer un euro numérique : revue de la directive DSP2, notamment sur les aspects de lutte contre la fraude et sur les entités exemptées d’agrément DSP2

Auteur : Elodie Totaud

Payments, cash management