Ecologie : vers quelle mobilité durable en Europe ?

Sur le volet mobilité, le Pacte vert européen doit se renouveler pour s’adapter à la transition écologique. Il faudra placer l’innovation au coeur de la transformation en s’appuyant sur les start-up innovantes, plaident Inès Gaïsset et Rodolphe Durand.

Cet article a été publié initialement sur le site des Echos. 

 

Porté par des milliers de manifestants pour le climat, le « Green Deal » européen est aujourd’hui secoué car jugé trop contraignant par certains pays, leurs industriels, leurs agriculteurs et plus récemment par des associations de citoyens qui s’opposent par exemple à l’autoroute A69 Toulouse-Castres . Ce Pacte Vert pourrait-il mettre à mal la compétitivité de l’Europe face aux Etats-Unis ou à la Chine ?

L’Europe, fondée sur la libre circulation, doit repenser son modèle pour une mobilité plus durable. Elle vise une réduction des émissions carbone de 90 % d’ici 2050, avec un jalon de 55 % d’ici 2030 pour devenir le premier continent neutre en carbone. Comment y parvenir et maintenir le cap ? Quelles trajectoires pour les pays européens et comment les impliquer dans cette vision ? Quels efforts et synergies à l’échelle européenne ?

Des changements considérables

Le Green Deal prévoit qu’il faudra d’ici 2030 avoir au moins 30 millions de voitures zéro émission sur les routes européennes, 100 villes neutres climatiquement, un doublement du trafic ferroviaire à grande vitesse, et des navires zéro carbone prêts à être commercialisés. D’ici 2035 ce sont les avions neutres en carbone qui devront être prêts à être commercialisés.

En 2050, toutes les voitures, camionnettes, bus, ainsi que les nouveaux véhicules lourds devront être zéro émission. Le trafic de fret ferroviaire devra doubler , lui-même intégré à un réseau multimodal transeuropéen de transport prévoyant un maillage de bornes de recharge de véhicules électriques tous les 60 kilomètres.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, il faudra redonner un « sens nouveau » à la mobilité européenne, placer l’innovation au coeur de la transformation et s’appuyer sur les jeunes pousses dans l’énergie, l’IA, le design et l’économie circulaire. Certaines innovations sont déjà de véritables accélérateurs vers une mobilité plus durable.

Des solutions de service numérique de type Maas (Mobility as a service) rendent possible l’intermodalité pour tous. La start-up Whim à Helsinki offre par exemple une expérience utilisateur innovante avec « un parcours client sans couture ». L’IA encourage le covoiturage, comme le fait la start-up Wintics qui permet de réduire le prix au péage en fonction du nombre de passagers. Ces solutions basées sur du « computer vision » doivent néanmoins intégrer les forts enjeux d’éthique et de RSE pour maximiser leur impact positif.

Industrie de rupture

Des solutions industrielles de rupture émergent dans toute l’Europe. Par exemple, ITEN à Chalon-sur-Saône qui développe des microbatteries lithium-ion à l’état solide. La deeptech va ouvrir dès 2026 sa principale unité de production et travaille sur la circularité de ses produits pour, au-delà de l’empreinte carbone, réduire les ressources prélevées de la terre et ainsi protéger les écosystèmes. Ces innovations qui continueront à émerger seront des facilitateurs essentiels pour atteindre les objectifs de cette feuille de route évolutive.

L’innovation ne pourra se développer et prospérer sans une mobilisation systémique à tous les niveaux, avec une coopération des écosystèmes d’innovation à l’échelle européenne, un investissement public et privé accru dans les technologies prometteuses à effet positif dans les secteurs d’avenir, et le développement de politiques publiques fortes soutenues par les initiatives européennes.

Ces différents leviers technologiques, financiers et politiques sont autant de facteurs fondamentaux qui permettront de mettre en mouvement l’écosystème européen aussi bien à l’échelle locale que nationale dans un effort de réinvention de notre modèle pour une mobilité plus durable, plus respectueuse de son environnement, et plus juste.

Inès Gaïsset est leader Territoires Intelligents et Durables chez Onepoint et vice-présidente du MIT Club de France.

Rodolphe Durand est directeur de l’institut Society & Organizations à HEC.

 

Auteur : Inès Gaïsset

Leader Smart-City & Innovation