La Loi Eckert et la déshérence : où en est-on 10 ans après ?

Depuis 2014, les contrôles de la brigade protection de la clientèle et pratiques commerciales se multiplient et avec eux, les sanctions. Avec la Loi Labaronne, l’ACPR (L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) étend le périmètre de contrôle aux assurances santé – dès lors qu’elles contiennent des garanties prévoyance – et à la retraite supplémentaire.

 

La déshérence représente un défi majeur pour le secteur, tant en termes de conformité réglementaire que de satisfaction client.

Le processus de traitement des contrats en déshérence reste parfois très manuel. Notamment, dans la reprise des anciens dossiers avec des clauses bénéficiaires qui n’ont pas pu être enregistrées dans les systèmes d’information (sur une page manuscrite par exemple). Les assureurs sont de fait contraint à faire appel à de la prestation externe pour retrouver les informations contrats.

Une pression constante de l’ACPR

Au cours des trois dernières années, les amendes liées à la déshérence en France ont principalement concerné les assureurs qui n’ont pas respecté leurs obligations en matière de recherche des bénéficiaires de contrats non réclamés. Les principales causes de sanctions sont :

  • Non-respect des obligations de recherche : Les assureurs doivent déployer des efforts raisonnables pour retrouver les bénéficiaires de contrats en déshérence. Des amendes ont été infligées lorsque ces efforts ont été jugés insuffisants.
  • Délais de règlement non respectés : Les assureurs sont tenus de verser les sommes dues dans un délai précis après le décès de l’assuré en application de la Loi Pacte de 2019. Des sanctions ont été appliquées pour les retards de paiement sans tenir compte également d’une revalorisation post-mortem des sommes et des intérêts légaux à verser en application des textes.
  • Non-conformité avec la loi Eckert : Cette loi impose aux assureurs de transférer les fonds non réclamés à la Caisse des Dépôts après un certain délai. Des amendes ont été imposées pour non-respect de cette obligation.
  • Non-respect des exigences de notification pour les plus de 62 ans : pour les contrats de retraite supplémentaires dont ils ont la gestion, les assureurs ont l’obligation de notifier avant le 30 septembre les assurés qui atteignent l’âge de 62 ans. En effet, les dispositions contractuelles ont été rédigées sur la base d’un âge légal de départ à la retraite à 62 ans et doivent donc s’appliquer comme telles, et ce, malgré le relèvement de l’âge légal à 64 ans (pour l’heure toujours prévu dans la loi)

Les montants des amendes varient en fonction de la gravité des manquements et de la taille de l’assureur concerné. Ces sanctions visent à renforcer la protection des bénéficiaires et à inciter les assureurs à améliorer leurs pratiques de gestion de la déshérence.

A titre d’illustration, Mutex écope en mars 2022 d’une amende de 8 millions d’euros, soit 38,1% du résultat net. Deux mois plus tard, la MGEN et Natixis ont été mises à l’amende respectivement de 1 et 3 millions d’euros. Mi-janvier 2025, c’est une Institution de prévoyance qui écope d’un blâme et d’une amende de 500 000 euros. Principal reproche : l’absence de notification des droits à la retraite supplémentaire pour son portefeuille d’assurés.

L’on pourrait croire que désormais ce sont les acteurs de l’assurance qui n’avaient pas été concernés jusqu’à lors qui mènent des projets liés à la déshérence, mais force est de constater que mêmes les acteurs qui était prêts dès les prémices de la mise en conformité en 2014 continuent à investir sur ce domaine réglementaire.

Un enjeu d’amélioration des données signalétiques clients / bénéficiaires…

La mise en œuvre de Solution 2 pilotée par le cabinet d’enquêteurs privés et de généalogistes Excellcium a convaincu beaucoup d’acteurs de croiser leurs données de signalétique clients / bénéficiaires. Objectif affiché :  améliorer la qualité des informations pour mieux notifier assurés et bénéficiaires de leurs droits à versement de retraite supplémentaire, de réversion suite au décès du conjoint retraité et de capital prévoyance ou décès. A noter : plus le nombre d’acteurs qui croisent leurs données sera élevé, plus le pourcentage d’enrichissement de la donnée sera élevé.

… et une meilleure maîtrise des délais de traitement

Enfin, un enjeu subsiste :  le délai de traitement des informations bénéficiaires et la transmission des informations vers la Direction des impôts dans le cadre de l’application du cadre fiscal propre aux assurances vie et décès.

Il convient de souligner l’importance pour les assureurs de mieux maîtriser leurs délais et leurs processus de manière à ne pas avoir à payer des intérêts légaux de retard dont les montants restent toujours très élevés (le taux légal s’élevant à 7,21% pour ce premier semestre 2025).

Pour répondre à cette exigence, des solutions émergent comme celle de Lidix avec Procuro qui permet aux assureurs de récupérer via une plateforme en marque blanche les pièces justificatives des bénéficiaires / réversataires de capitaux et de rentes. Cette plateforme permet également l’envoi des éléments vers les directions des impôts pour le calcul des droits de mutation dans le cadre de l’application de l’article 757 B du Code Général des Impôts.

Cette plateforme dispose d’une piste d’audit qui permet de suivre l’avancement des dossiers à compter de l’envoi de la demande auprès des bénéficiaires/ réversataires des pièces justificatives jusqu’à leur réception complète. Elle permet de fait de suivre le délai de 15 jours à compter de l’envoi par l’assureur de la liste des pièces justificatives ainsi que le délai de 30 jours à l’issue duquel les sommes doivent être versées aux bénéficiaires / réversataires.

Un accompagnement de bout en bout du processus de déshérence

Nous pouvons vous accompagner sur différentes étapes de votre projet :

Diagnostic Complet : le diagnostic complet est la première étape cruciale pour comprendre l’état actuel de la gestion de la déshérence par l’assureur. Il s’agit de réaliser une évaluation approfondie des dispositifs en place, en identifiant les contrats en déshérence et les retraites non liquidées. Cette analyse inclut une étude détaillée de la volumétrie des contrats concernés et des provisions mathématiques techniques (PMT) associées. L’objectif est de fournir une cartographie précise de la situation, mettant en lumière les zones nécessitant une attention particulière et permettant de prioriser les actions à entreprendre.

Optimisation des Processus : une fois le diagnostic établi, il est nécessaire de se concentrer sur l’optimisation des processus. Cela implique la recherche et la sélection de prestataires spécialisés dans la localisation des bénéficiaires, avec la mise en place de preuves de concept (PoC) pour tester leur efficacité à court terme. Il s’agit d’identifier les points d’achoppement dans le déroulé des processus en œuvre, qu’il s’agisse de goulots d’étranglement ou de procédures obsolètes. Sur cette base, sont rédigés des normes, processus et procédures adaptés, visant à améliorer l’efficacité et la fluidité de votre gestion de la déshérence.

Solutions Innovantes et Conformité : une feuille de route fonctionnelle et technique pour la mise en œuvre de solutions innovantes est définie. Cela inclut des mécanismes de revalorisation post mortem et le calcul des intérêts de retard, tout en assurant le respect des délais réglementaires. Ces solutions sont conçues pour non seulement répondre aux exigences légales, mais aussi pour offrir une meilleure expérience aux bénéficiaires, renforçant ainsi la confiance et la satisfaction client.

Conduite du Changement : la réussite de toute transformation repose sur l’adhésion et l’engagement des équipes. Une formation dédiée peut être dispensée à l’ensemble des collaborateurs acteurs dans le traitement de la déshérence. Elle est axée sur la gestion efficace et conforme de la déshérence. Cette formation couvre les nouvelles procédures, l’utilisation des outils mis en place, et les meilleures pratiques pour assurer une transition en douceur. L’objectif est de garantir que les équipes soient bien préparées et engagées dans cette démarche, assurant ainsi la pérennité des améliorations apportées.

Une meilleure image et un rebond commercial pour l’acteur qui maîtrise son processus de déshérence

En intégrant ces éléments, l’accompagnement vise à transformer la gestion de la déshérence en un processus optimisé et conforme, tout en améliorant l’expérience client et en renforçant la position de l’institution sur le marché.

Concrètement, c’est en offrant une expérience satisfaisante aux bénéficiaires, que l’on ouvre la possibilité de conserver les fonds reçus via un rebond commercial au travers de la souscription d’un contrat par les bénéficiaires.

Auteur

  • Dominique Beauquis

    Experte Réglementaire Assurances